Après avoir éclaboussé plusieurs élus dans des histoires de financement politique devant la Commission Charbonneau, l'ex-organisateur Gilles Cloutier a écorché jeudi un avocat de Blainville qui a depuis été nommé juge.
M. Cloutier, qui faisait alors du développement des affaires pour la firme de génie Roche, a raconté qu'en 1997, un avocat, Me Michel Déziel, qui s'occupait du financement électoral municipal à Blainville, lui avait demandé de "blanchir" une somme de 30 000 $. "Il m'a demandé si je pouvais, en 1997, changer 30 000 $ en 750 $", a relaté le témoin. Me Déziel lui avait précisé que la somme provenait de la firme de génie-conseil Dessau, très présente à Blainville, à l'époque.
La somme était "dans une enveloppe blanche et c'était tous des billets de 100 $", s'est rappelé le témoin. "Lui, comme avocat, aller blanchir des 750 $, ça paraît mal pour son code d'éthique et tout ça. Un avocat, commencer à changer des chèques de porte à porte pour du financement de parti politique... ça fait qu'il me l'a demandé à moi", a expliqué le témoin. M. Cloutier l'a fait, en demandant à des proches et à des connaissances de faire un chèque en bonne et due forme au nom d'Action civique Blainville, en leur vantant le fait qu'ils bénéficieraient ainsi de crédits d'impôt.
Ce n'est pas la première fois que des allégations émergent concernant Michel Déziel, dont le nom a été évoqué par le témoin Gilles Cloutier, ex-vice-président de la firme Roche, à la commission Charbonneau. L'avocat devenu juge a travaillé à plusieurs élections sur la rive nord de Montréal.
"Deux, trois jours après, je suis allé porter tous les chèques à Me Déziel", a rapporté M. Cloutier. Il a admis que les deux conversations ont eu lieu seul à seul, Me Déziel et lui, donc sans témoin. C'est M. Cloutier qui a pris l'initiative d'adresser le commentaire suivant à la commission: "M. Déziel, par après je pense que c'est en 2004-2005, environ _ a été nommé juge à la Cour supérieure du Québec, district de Laval. Je voulais le mentionner, parce que c'est un fait réel. Il avait fait une fraude en faisant changer des chèques, je trouvais que je devais _ comme j'ai dit la vérité sur tout, à date _ je me devais de mentionner que c'était un juge", a-t-il dit.
Peu de temps après la diffusion du témoignage de M. Cloutier, le Conseil canadien de la magistrature a fait savoir qu'il prenait au sérieux toute allégation faite à l'endroit d'un juge d'une Cour supérieure. Il a ajouté qu'il avait demandé au vice-président du comité sur la conduite des juges d'examiner le dossier. Le Conseil canadien de la magistrature a signalé avoir reçu une demande en ce sens de la part du juge en chef de la Cour supérieure du Québec, François Rolland.
1000$ POUR 5 MINUTES
Plus tôt, M. Cloutier avait expliqué que faire du financement au provincial, pour une firme de génie-conseil, était utile à deux chapitres. "La nécessité de financer, pour une firme de génie au provincial, c'était pour, au départ, d'avoir des mandats du provincial, et deuxièmement, ça nous aidait pour avoir les subventions le plus tôt possible au ministère concerné", a expliqué le vieux routier de l'organisation et du financement. M. Cloutier a fait comprendre que le retour d'ascenseur était moins direct qu'au municipal, où une élection clés en main organisée pour un maire entraîne plus automatiquement un mandat pour la firme de génie-conseil.
Il a raconté avoir déjà organisé un événement de financement pour une députée péquiste, Lucie Papineau, bien qu'il se décrive comme "un bon libéral". Mme Papineau, jadis députée de Prévost, est aujourd'hui directrice de cabinet de la ministre de la Famille, Nicole Léger. Il avait toutefois exigé, pour le faire, que le ministre des Transports, Guy Chevrette, soit présent, puisqu'il le connaissait et s'entendait bien avec lui. Mais surtout, comme M. Chevrette était ministre des Transports, cela l'aidait à attirer des entrepreneurs prêts à payer 1000 $ pour lui parler lors du cocktail de financement. Il en a d'ailleurs invité 15, qui ont eu droit chacun à cinq minutes pour exprimer leurs doléances au ministre des Transports.
L'essentiel des doléances des entrepreneurs portait sur le fait qu'ils trouvaient que les appels d'offres étaient lancés trop tard dans la saison, en mai et juin, et qu'ils étaient tous lancés en même temps, causant ainsi une augmentation des coûts, a rapporté M. Cloutier.
CONTRE-INTERROGATOIRES
En contre-interrogatoire, l'avocat de Roche, Me Michel Massicotte, a tenté de miner la crédibilité du témoin en s'en prenant, par exemple, au fait qu'il avait réclamé de son employeur Roche le remboursement de petits-déjeuners, alors que ledit restaurant ne servait pas de petits-déjeuners. Mais M. Cloutier a répliqué que c'est le vice-président de Roche, Marc-Yvan Côté, de qui il relevait, qui lui avait demandé de gonfler ainsi ses dépenses de repas ou de kilométrage, lorsqu'il avait des dépenses qui paraissaient moins bien à présenter à Roche.
Me Massicotte a laissé entendre que M. Cloutier pouvait témoigner ainsi par amertume envers Roche, qui voulait implanter des règles de comportement plus strictes. "Est-il exact de dire qu'une des raisons pour lesquelles vous avez quitté la compagnie, c'est que vous n'étiez pas du tout d'accord avec le resserrement des pratiques et que vous vouliez continuer votre beau manège?" lui a demandé Me Massicotte.
CHEVRETTE ÉCLABOUSSÉ
Mais M. Cloutier a répliqué qu'il avait quitté Roche pour Dessau en 2005 parce qu'il ne s'entendait pas avec France Michaud, la directrice de son bureau, et qu'il avait reçu une meilleure offre de Dessau. L'avocate du Parti québécois, Me Estelle Tremblay, lui a fait dire qu'il ne se sentait pas "malhonnête" d'avoir agi comme il l'a fait, bien qu'il admette avoir posé des "actes malhonnêtes". Elle est aussi revenue sur l'appel d'offres de la route 125 à Saint-Donat, ce qui a permis à M. Cloutier de répéter qu'à ses yeux, l'ex-ministre péquiste Guy Chevrette avait participé à une "magouille", bien que ce dernier le nie.
Le commissaire Renaud Lachance lui a demandé si Guy Chevrette et son ami Claude Beaulieu qui lui aurait réclamé de l'argent, selon son témoignage de mercredi étaient au courant du fait que M. Cloutier avait été reconnu coupable par le Bureau de la concurrence pour avoir participé à un cartel dans le déneigement en 2001. Ils le savaient, a répondu le témoin, ajoutant même que l'ex-ministre Chevrette s'était offert pour prendre sa défense. "Il m'a dit: 'Gilles, je vais leur parler à tes patrons'", a-t-il relaté.
Les contre-interrogatoires de M. Cloutier se poursuivront le lundi 13 mai. Un avocat représentant l'ex-ministre Chevrette a notamment demandé de pouvoir le contre-interroger.
La somme était "dans une enveloppe blanche et c'était tous des billets de 100 $", s'est rappelé le témoin. "Lui, comme avocat, aller blanchir des 750 $, ça paraît mal pour son code d'éthique et tout ça. Un avocat, commencer à changer des chèques de porte à porte pour du financement de parti politique... ça fait qu'il me l'a demandé à moi", a expliqué le témoin. M. Cloutier l'a fait, en demandant à des proches et à des connaissances de faire un chèque en bonne et due forme au nom d'Action civique Blainville, en leur vantant le fait qu'ils bénéficieraient ainsi de crédits d'impôt.
Ce n'est pas la première fois que des allégations émergent concernant Michel Déziel, dont le nom a été évoqué par le témoin Gilles Cloutier, ex-vice-président de la firme Roche, à la commission Charbonneau. L'avocat devenu juge a travaillé à plusieurs élections sur la rive nord de Montréal.
"Deux, trois jours après, je suis allé porter tous les chèques à Me Déziel", a rapporté M. Cloutier. Il a admis que les deux conversations ont eu lieu seul à seul, Me Déziel et lui, donc sans témoin. C'est M. Cloutier qui a pris l'initiative d'adresser le commentaire suivant à la commission: "M. Déziel, par après je pense que c'est en 2004-2005, environ _ a été nommé juge à la Cour supérieure du Québec, district de Laval. Je voulais le mentionner, parce que c'est un fait réel. Il avait fait une fraude en faisant changer des chèques, je trouvais que je devais _ comme j'ai dit la vérité sur tout, à date _ je me devais de mentionner que c'était un juge", a-t-il dit.
Peu de temps après la diffusion du témoignage de M. Cloutier, le Conseil canadien de la magistrature a fait savoir qu'il prenait au sérieux toute allégation faite à l'endroit d'un juge d'une Cour supérieure. Il a ajouté qu'il avait demandé au vice-président du comité sur la conduite des juges d'examiner le dossier. Le Conseil canadien de la magistrature a signalé avoir reçu une demande en ce sens de la part du juge en chef de la Cour supérieure du Québec, François Rolland.
1000$ POUR 5 MINUTES
Plus tôt, M. Cloutier avait expliqué que faire du financement au provincial, pour une firme de génie-conseil, était utile à deux chapitres. "La nécessité de financer, pour une firme de génie au provincial, c'était pour, au départ, d'avoir des mandats du provincial, et deuxièmement, ça nous aidait pour avoir les subventions le plus tôt possible au ministère concerné", a expliqué le vieux routier de l'organisation et du financement. M. Cloutier a fait comprendre que le retour d'ascenseur était moins direct qu'au municipal, où une élection clés en main organisée pour un maire entraîne plus automatiquement un mandat pour la firme de génie-conseil.
Il a raconté avoir déjà organisé un événement de financement pour une députée péquiste, Lucie Papineau, bien qu'il se décrive comme "un bon libéral". Mme Papineau, jadis députée de Prévost, est aujourd'hui directrice de cabinet de la ministre de la Famille, Nicole Léger. Il avait toutefois exigé, pour le faire, que le ministre des Transports, Guy Chevrette, soit présent, puisqu'il le connaissait et s'entendait bien avec lui. Mais surtout, comme M. Chevrette était ministre des Transports, cela l'aidait à attirer des entrepreneurs prêts à payer 1000 $ pour lui parler lors du cocktail de financement. Il en a d'ailleurs invité 15, qui ont eu droit chacun à cinq minutes pour exprimer leurs doléances au ministre des Transports.
L'essentiel des doléances des entrepreneurs portait sur le fait qu'ils trouvaient que les appels d'offres étaient lancés trop tard dans la saison, en mai et juin, et qu'ils étaient tous lancés en même temps, causant ainsi une augmentation des coûts, a rapporté M. Cloutier.
CONTRE-INTERROGATOIRES
En contre-interrogatoire, l'avocat de Roche, Me Michel Massicotte, a tenté de miner la crédibilité du témoin en s'en prenant, par exemple, au fait qu'il avait réclamé de son employeur Roche le remboursement de petits-déjeuners, alors que ledit restaurant ne servait pas de petits-déjeuners. Mais M. Cloutier a répliqué que c'est le vice-président de Roche, Marc-Yvan Côté, de qui il relevait, qui lui avait demandé de gonfler ainsi ses dépenses de repas ou de kilométrage, lorsqu'il avait des dépenses qui paraissaient moins bien à présenter à Roche.
Me Massicotte a laissé entendre que M. Cloutier pouvait témoigner ainsi par amertume envers Roche, qui voulait implanter des règles de comportement plus strictes. "Est-il exact de dire qu'une des raisons pour lesquelles vous avez quitté la compagnie, c'est que vous n'étiez pas du tout d'accord avec le resserrement des pratiques et que vous vouliez continuer votre beau manège?" lui a demandé Me Massicotte.
CHEVRETTE ÉCLABOUSSÉ
Mais M. Cloutier a répliqué qu'il avait quitté Roche pour Dessau en 2005 parce qu'il ne s'entendait pas avec France Michaud, la directrice de son bureau, et qu'il avait reçu une meilleure offre de Dessau. L'avocate du Parti québécois, Me Estelle Tremblay, lui a fait dire qu'il ne se sentait pas "malhonnête" d'avoir agi comme il l'a fait, bien qu'il admette avoir posé des "actes malhonnêtes". Elle est aussi revenue sur l'appel d'offres de la route 125 à Saint-Donat, ce qui a permis à M. Cloutier de répéter qu'à ses yeux, l'ex-ministre péquiste Guy Chevrette avait participé à une "magouille", bien que ce dernier le nie.
Le commissaire Renaud Lachance lui a demandé si Guy Chevrette et son ami Claude Beaulieu qui lui aurait réclamé de l'argent, selon son témoignage de mercredi étaient au courant du fait que M. Cloutier avait été reconnu coupable par le Bureau de la concurrence pour avoir participé à un cartel dans le déneigement en 2001. Ils le savaient, a répondu le témoin, ajoutant même que l'ex-ministre Chevrette s'était offert pour prendre sa défense. "Il m'a dit: 'Gilles, je vais leur parler à tes patrons'", a-t-il relaté.
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