Jules Massenet a écrit deux versions de son opéra. La première avec voix de ténor pour le rôle titre de Werther. Et puis, quelques années plus tard, inspiré par un baryton de sa connaissance qu’il tenait en haute estime, il a fait une légère retouche à son œuvre. Le compositeur a seulement transposé la partie du chanteur pour que le baryton ne fasse pas un couac dans le seul aria connu de l’opéra, « Pourquoi me réveiller? ». L’histoire, inspirée du Werther de Goethe, avait passablement frappé les imaginations masculines exacerbées, car on avait enregistré à sa suite une vague de suicides.

C’est que le héros, archétype du romantique, met fin à ses jours, car l’élue de son cœur, Charlotte, a été promise à quelqu’un d’autre par arrangement familial et se rangera au choix de papa. C’en sera trop pour Werther, qui ne s’imagine pas la voir s’éloigner de lui. Et surtout, ce qui ajoute en dramatisation, c’est que ça se passe au temps de Noël.

UN CASTING AU POINT

Côté décor, on fait dans le minimalisme, le même aménagement servant tout au long, avec des nuances subtiles dans les éclairages. Mais ce qui nous importe plus que tout, c’est comment le message de Massenet a été servi. C’est une très jolie réussite. Évidemment, c’est quasi tout au long un récitatif et les arias rarissimes. C’est le tempérament de la pièce qui prend le dessus. Et à ce chapitre, les protagonistes sont très bons acteurs. D’abord Werther, incarné par Philipp Addis, un baryton canadien qui, bien qu’anglophone, maîtrise son français à la perfection. Tellement, qu’on n’est même pas tenu de suivre sur les surtitres qui apparaissent en haut de la scène.

C’est très bien parce qu’habituellement, les chanteurs anglophones massacrent allègrement la langue de Molière. Charlotte est jouée par la mezzo-soprano de chez nous, Michèle Losier. Et Albert, le mari de Charlotte, assure avec une voix bien présente de baryton-basse, j’ai nommé le canadien Stephen Hegedus. C’est l’Orchestre symphonique de Montréal qui est dans la fosse, mené par maestro Jean-Marie Zeitouni, qui tire le maximum de beaux effets subtils d’orchestre. Enfin, notons la participation des Petits Chanteurs du Mont-Royal. Les costumes viennent de chez Barilà, costumes du XXe siècle au passage pour donner une note contemporaine.

J’accorde 8,5 sur 10 à cette production, qui est à l’affiche encore les 29 et 31 janvier et le 3 février.