Mardi, 1 novembre 2016

PFAFF PASSIONNÉMENT ALSACE

 


J’ai rencontré  Frédéric Raynaud, Directeur Général La Cave des Vignerons de Pfaffenheim qui  m’a accordé cette entrevue.



RH. –  Frédéric Raynaud, présentez-nous l’Alsace et son étonnante diversité de sols et de climats.


 
FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – La plaine d’Alsace est une région de 190 kilomètres de long sur 50 kilomètres de large bordée à l’ouest par le massif montagneux des Vosges et à l’Est par le Rhin. Cette zone de fracture du fossé rhénan est en fait une véritable mosaïque de terroirs : calcaire, granite, schiste, gneiss, grès, marne, ardoise, lœss... Le vignoble est protégé des pluies et des vents de l’ouest par les Vosges, la quantité moyenne des précipitations est ainsi la plus faible des vignobles de France. C’est une zone très adaptée à la culture de la vigne.

RH. –  La culture de la vigne et la production de vin ne datent pas d’hier.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – On estime que la culture de la vigne date de l’arrivée des Romains dans ce qui s’appelait à l’époque la Germanie Supérieure. Le stationnement des militaires romains qui consommaient des vins acheminés depuis l’Hispanie (l’Espagne) a stimulé les débuts de la viticulture, d’abord en Moselle, puis en Alsace. Mais la période de fort développement de la viticulture alsacienne date principalement du Moyen-Âge sous l’impulsion des ordres monastiques. Dès le 10ème siècle, les vins « d’Aussey » comme ils étaient dénommés, étaient déjà exportés vers les pays nordiques. Cette période faste de la viticulture alsacienne a duré jusqu’au 16ème siècle. À cette époque, le vignoble alsacien était deux fois plus grand qu’il ne l’est aujourd’hui. Avec la Guerre de Trente Ans (guerre de religions entre Monarchies Catholiques et Protestantes 1618-1648), le vignoble est pratiquement intégralement détruit. Il sera reconstruit à la fin du 18ème siècle. L’Alsace va être annexée par l’Empire Allemand en 1871. Elle retourne au territoire français en 1918, mais sera à nouveau annexée par l’Allemagne Nazie en 1940, pour finalement redevenir française en 1945. Le vignoble va connaître des politiques de gestion différentes, des destructions également lors des périodes de guerre.

RH. –  L’Alsace se différencie des autres régions vinicoles françaises par ses cépages. Quels sont-ils?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. –  Il est vrai que les cépages cultivés en Alsace ne se retrouvent dans aucun vignoble historique français, même si depuis quelques années les régions du Sud de la France s’essaient à la culture de certains de ces cépages avec plus ou moins de succès. On parle généralement des 7 cépages alsaciens qui sont : le Sylvaner, le Pinot Blanc, le Riesling, le Muscat, le Pinot Gris (anciennement Tokay ou Tokay pinot Gris), le Gewurztraminer et le Pinot Noir, mais il en existe d’autres qui sont couramment cultivés tels que le Chardonnay (interdit pour les vins tranquilles mais autorisé pour les Crémants d’Alsace), le Chasselas, l’Auxerrois (cépage très proche du Pinot Blanc) ou les variétés de Muscat (Muscat Ottonel, Muscat d’Alexandrie, encore appelé Muscat à petits Grains). Il y a donc en Alsace une grande diversité de cépages et de profils gustatifs.

RH. –  La diversité de ses terroirs et de ses cépages s’exprime à travers ses Appellations et ses Mentions.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. –  Il y a tout d’abord l’appellation AOC Alsace, reconnue officiellement en 1962, celle que l’on trouve le plus fréquemment. Il y a ensuite l’appellation AOC Alsace Grand Cru qui se compose de 51 terroirs d’exception définis entre 1975 et 2011. En 2011, chaque terroir a obtenu l’AOC, il y a donc aujourd’hui 51 appellations AOC Grand Cru intégrant le nom du terroir. Pour les vins effervescents, l’appellation AOC Crémant d’Alsace a été définie en 1976.

A cela, se rajoute parfois des mentions telles que Vendanges Tardives ou Sélection de Grains Nobles qui bénéficie également de cahier de charges spécifiques.

En tenant compte des cépages, des appellations, des terroirs, des lieux-dits, des mentions, et des couleurs, ce sont près de 640 vins différents qui peuvent être produits en Alsace.

RH. – Que sont les Lieux-dits?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – L’AOC Alsace peut être complétée par deux dénominations : « communales » ou « lieux-dits ». Il y a 14 noms de communes autorisés (exemple : Rouge d’Ottrott ou Côtes de Rouffach) et un grand nombre de noms de lieu-dit qui correspondent à des zones parcellaires au terroir homogène mais n’ayant pas tous les atouts d’un Grand Cru.

RH. – De quel ordre est la production des vins d’Alsace et quelle est sa place dans la production française?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD
. – Le vignoble alsacien s’étend sur 15.500 hectares. La récolte moyenne en Alsace est d’environ 1.100.000 hectolitres soit 110 millions de litres. C’est un des plus petits vignobles de France en termes de production devant les vignobles du Jura, de la Savoie et de la Corse. Le vignoble alsacien est très morcelé, la taille moyenne des exploitations est inférieure à 2 hectares. Cette situation est la conséquence de la Révolution Française de 1789 qui a morcelé les grands domaines de l’époque pour les revendre. Depuis cette époque, les familles propriétaires ont toujours mis un point d’honneur à conserver ce patrimoine viticole, et de ne pas le vendre lors des successions. Il y a donc très peu de possibilité d’agrandir les vignobles familiaux existants.


 
RH. – Comment est née la Cave coopérative des vignerons de Pfaffenheim et comment elle a évolué jusqu’à aujourd’hui?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – La Cave des vignerons de Pfaffenheim est née en 1956 de la volonté d’un petit groupe de viticulteurs de mettre en commun un outil de vinification et de conditionnement permettant de valoriser leurs récoltes. En 1968, la cave fusionne avec celle de Gueberschwihr, le village voisin. Ce sont alors une centaine de vignerons qui apportent leurs vendanges. Après des années 80 très difficiles pour la viticulture alsacienne, la Cave décide d’orienter sa stratégie sur la qualité de ses vins. À partir du milieu des années 90, la Cave des Vignerons de Pfaffenheim est considérée comme l’un des meilleurs producteurs de vins d’Alsace, ce qui lui permet de se développer sur des marchés à l’export, comme le Canada et notamment le Québec. D’ailleurs, Pfaff sera élu Meilleur Producteur 2014 par le Concours Sélections Mondiales des Vins du Canada, et Meilleur Producteur Français 2015 à la fois par l’International Wine& Spirit Competition de Londres et l’AustriaWine Challenge de Vienne.

En 1997, la Cave reprend la Maison Dopff&Irion avec les vins du Château de Riquewihr et du Clos Château d’Isenbourg. En 2003, un vendangeoir ultramoderne d’un montant de trois millions d’euros est mis en place afin de gagner encore en qualité. En 2017, plus de deux millions d’euros vont être investis dans une nouvelle ligne d’embouteillage sous gaz neutre qui va permettre d’accroître encore le potentiel qualitatif et aromatique des vins.

En 2013, la marque Pfaffenheim est devenue Pfaff. La règlementation européenne a en effet interdit l’utilisation des noms de village pour les vins, ceci pouvant induire en erreur les consommateurs qui pourraient penser qu’il s’agit d’une appellation d’origine. Nous avons donc dû changer notre marque ce qui n’est pas aisé quand vous avez communiqué et investi pendant près de cinquante ans sur une marque comme Pfaffenheim. Nous avons finalement opté pour Pfaff, qui reste proche de Pfaffenheim, et c’est plus facile à prononcer.

RH. – Il y a une philosophie vinicole de La Cave des Vignerons de Pfaffenheim qui a donné des résultats probants.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Tout est basé sur le respect du produit et l’implication des vignerons; nous n’avons pas de technicien viticole, c’est une commission de vignerons qui décide des axes et contrôle la bonne application des cahiers des charges viticoles. La quasi-totalité des raisins sont vendangés manuellement, et les vignerons doivent faire en sorte d’apporter des raisins parfaitement sains avec le niveau de maturité attendu par le Maître de chai. La vendange manuelle permet justement de faire ce tri directement dans la vigne. En fait, la Cave fonctionne comme une grande famille.

RH. –  Quels sont les cépages que cultivent vos membres?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Tous les cépages autorisés en Alsace sont représentés chez nos adhérents. Les cépages principaux sont le Riesling, le Gewurztraminer, le Pinot Blanc et le Pinot Gris qui représentent à eux quatre plus de 75% de la production. Ils sont complétés par du Sylvaner, du Muscat, du Pinot Noir, du Chardonnay et un peu de Chasselas.

RH. – Quel est le type d’agriculture recommandé par la Coopérative?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Nous demandons à nos vignerons de respecter le produit et la nature. Nous les poussons ainsi à utiliser le moins possible des produits phytosanitaires, et uniquement quand cela est vraiment nécessaire. Nous sommes actuellement dans une réflexion sur les moyens de mettre en place une véritable agriculture raisonnée et durable sur l’ensemble du vignoble.

RH. – Comment sont organisées les vendanges.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Tout d’abord, un planning de récolte en fonction de la maturité de chaque cépage et du type de produit ciblé est mis en place avec au maximum 2 cépages différents autorisés sur une même journée. Cela permet d’affecter 5 pressoirs pneumatiques par cépage. Chaque apport est contrôlé et un code qualitatif A, B ou C lui est affecté. Les raisins sont alors regroupés par qualité dans un pressoir correspondant. Le planning est modifiable en fonction de l’avancée du mûrissement des raisins et des aléas de la météo.

Les équipes en charge de la vinification, renforcées par une trentaine de travailleurs saisonniers, travaillent en équipe par rotation, la cave fonctionnant ainsi 24 heures sur 24 pendant 4 à 5 semaines.

Les vendangeurs sont gérés directement par les vignerons qui se chargent également du transport des raisins à la cave.

Tout cela se complique quand il y a un risque d’altération de la vendange sur les vignes, ou quand il y a beaucoup de pluie, auquel cas il faut rentrer la vendange le plus rapidement possible, ce qui n’est pas toujours aisé.

RH. – Dans la complexité et la variété des vins que vous produisez, la vinification doit-être un véritable casse-tête.


 
FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Jean-François Kueny, notre Maître de chai essaie de vinifier le maximum de petits lots en s’appuyant sur des sélections parcellaires. Cela lui permet ensuite soit d’isoler ces lots pour des cuvées spécifiques, soit de faire des assemblages à partir de plusieurs lots, en fonction des qualités de chaque lot de départ. En fait, plus vous avez de diversité dans les lots vinifiés, plus le potentiel d’assemblage qualitatif est important.

Cela nécessite un grand nombre de cuves de différentes tailles, et effectivement un peu plus de travail. Mais c’est à ce prix que l’on peut créer des vins de haute qualité.

RH. – La Cave coopérative des vignerons de Pfaffenheim est particulièrement fière de ses Grands Crus.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Il est vrai que nous avons la chance d’avoir quatre grands crus d’exception : Steinert, Goldert, Hatschbourg et Zinnkoepflé, pratiquement tous avec les trois cépages Riesling, Pinot Gris et Gewurztraminer. Chacun a sa personnalité et ses atouts, ce qui permet de proposer des profils organoleptiques très différents. Ce sont des vins qui sont régulièrement récompensés dans les grands concours internationaux.

RH. – Vous avez de très belles gammes de vins, voulez-vous nous les présenter?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Nous avons, en effet,  plusieurs gammes de vins. La gamme Tradition (étiquette rouge) est une gamme qui exprime les caractéristiques aromatiques de chacun des sept cépages.

La gamme Cuvée est une sélection de parcelles et de cuvée. Elle propose une version plus « gastronomique » des sept cépages alsaciens, avec une plus grande complexité aromatique.
Nous avons également créé une gamme de vins issus de l’assemblage de différents grands crus sous le nom de Steingold. L’objectif est d’apporter pour un cépage donné une complexité par la combinaison de différents terroirs. Il existe 4 vins dans cette gamme : Riesling, Pinot Gris, Muscat et Gewurztraminer. L’assemblage de ces cépages au sein d’un même Grand Cru nous fait perdre l’appellation Grand Cru, mais les conditions de production sont bien celles d’un Grand Cru.

Nous avons ensuite une gamme des Grands Crus sur 4 terroirs différents (Steinert, Goldert, Zinnkoepflé et Hatschbourg) avec les trois cépages Riesling, Pinot Gris et Gewurztraminer.

Nous avons également créé une gamme de vins que nous appelons « spécialités » dans laquelle on retrouve le fameux Black Tie, mais également d’autres vins très concentrés et travaillés tels que le Pinot Noir La Griffe du Diable qui est élaboré à partir de faible rendement et bénéficie d’un élevage en fût de chêne, ou le Gewurztraminer Ancestrum qui est obtenu à partir de raisins récoltés trois semaines après les autres Gewurztraminers. Enfin, nous avons une gamme de cinq Crémants d’Alsace dont un rosé.

Nous travaillons en permanence sur la recherche de nouveaux produits, en particulier sur le segment premium.

RH. – De quel ordre de grandeur est votre production et quelle est la place du Canada et du Québec dans votre marché d’exportation?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Nous produisons au total l’équivalent de 250,000  caisses par an (3,000,000 de bouteilles). Nous exportons chaque année au Canada, et principalement au Québec, environ 50,000 caisses, soit 20% de notre production.

RH. – Vous avez apporté 5 produits  pour déguster. Ils représentent la typicité de votre gamme. Dans quel ordre voulez-vous procéder?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD
. – En dégustation, il est toujours préférable d’aller des vins les plus secs aux vins les plus sucrés. Je vous propose de suivre cet ordre pour notre dégustation.

RH. –   Nous débouchons le Pinot Blanc Tradition Pfaff 2015, 12,5 degrés d’alcool.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Le Pinot Blanc est un vin sec, mais avec une certaine rondeur en fin de bouche qui est amenée par les 6 grammes de sucres résiduels qui viennent équilibrer l’acidité naturelle. C’est le premier cépage qui est récolté chaque année. Une importante partie des Pinot Blanc est d’ailleurs utilisée pour l’élaboration des Crémants d’Alsace.


 
RH. – Robe jaune pâle, avec de légers reflets verts, limpide et brillante. Bouquet délicat et tout en nuances,  de pêche, de pomme, d’abricot, de miel et de fleur d’oranger.

L’attaque en bouche est franche, mais  possède un fondu agréable avec des arômes de pêche jaune et de mirabelle. Harmonieux et à la fois croquant, frais, et tendre, avec de subtiles notes grillées. Une longue fin de bouche charmeuse et rafraîchissante, avec une touche gourmande de noisette, de réglisse et de fumé.

Quels mariages nous proposez-vous pour ce vin et à quelle température doit-on le servir au repas?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Le Pinot Blanc est un cépage intéressant car il donne des vins qui se marient avec énormément de plats. Il est très souvent utilisé pour les buffets ou les brunchs, ce qui ne l’empêche pas d’être très agréable sans accompagnement. Vous pouvez le boire avec des poissons, avec une assiette de charcuterie, avec des pâtes, des quiches ou des tourtes à la viande. Il est également parfait en accompagnement des asperges. C’est un vin qui doit être servi à une température entre 10 et 12°C.

RH. – Combien de temps est-ce qu’il peut se conserver en cave?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Le Pinot Blanc n’est pas un vin de garde, même si j’ai déjà été surpris par la tenue de quelques vieilles bouteilles qui avaient plus de trente ans. C’est un vin à boire dans le deux ou trois ans si l’on veut toujours bénéficier de sa fraîcheur.

Le Pinot Blanc Tradition Pfaff (millésime 2014), est vendu à la Société de Alcools du Québec, code 11459677. Prix 15.95 $.

RH. –   Nous débouchons maintenant le Riesling Cuvée Jupiter Pfaff 2015, 12,5 degrés d’alcool.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Le Riesling est le cépage emblématique de l’Alsace. C’est un vin sec, très aromatique qui présente toujours une grande élégance. Ce n’est pas un cépage facile à cultiver. Il craint les fortes chaleurs qui peuvent bloquer son mûrissement mais il lui faut cependant un bon ensoleillement. Le Riesling Cuvée Jupiter est issu de sélections de parcelles et cuvées par nos œnologues, pour obtenir des vins avec une certaine complexité aromatique. Du fait du potentiel acidique du cépage, nous laissons toujours un peu de sucre résiduel dans les Rieslings, de l’ordre de 5 à 6 grammes, ce qui permet d’arrondir la fin de bouche, et de ne pas avoir de notes acides. Mais, on ne ressent absolument pas le goût sucré, contrairement par exemple aux Rieslings américains.


 
RH. – Robe jaune pâle, brillante, avec des reflets verts. Riche bouquet de fleurs de tilleul et de chèvrefeuille, un peu de citronnelle, et de l’or des bois. Viennent ensuite des notes de citron, de pamplemousse rose, ainsi que de poire compotée; un soupçon de cumin, de réglisse et de cannelle, et de la minéralité.

En bouche l’attaque est vive, racée, élégante, beaucoup d’ampleur en milieu de bouche, avec un large éventail d’arômes de fleurs blanches ; une minéralité très présente. Une longue finale fraîche, très plaisir.

Quels mariages nous proposez-vous pour ce vin et à quelle température doit-on le servir pendant un repas?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Le Riesling est un vin qui s’associe parfaitement avec les poissons et les fruits de mer, mais également avec des viandes blanches ou des volailles. J’ai dernièrement mangé dans une winstub alsacienne, un délicieux coq aux riesling et morilles cuit en croûte, accompagné du Riesling Cuvée Jupiter!

C’est également un vin qui accompagne parfaitement les sushis, sashimis, ainsi que les poissons fumés.

RH. – Combien de temps peut-il se conserver en cave?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Un Riesling peut se conserver de nombreuses années à condition que sa structure acide soit suffisamment solide. Nous avons dégusté récemment des Rieslings des années cinquante qui présentaient toujours une belle fraîcheur et une puissance aromatique étonnante. En vieillissant, les Rieslings présentent de très fortes notes minérales avec des arômes de cire, de pierre à fusil, voire de pétrole. Leur robe devient alors d’un jaune or foncé.  

Le Riesling Cuvée Jupiter Pfaff (millésime 2014), est vendu à la Société de Alcools du Québec, code 00914424. Prix 18.95 $.

RH. –   Nous débouchons maintenant le Riesling/Pinot Gris Black Tie 2015, 12,5 degrés d’alcool.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – La cave des Vignerons de Pfaffenheim a toujours cherché à conjuguer tradition et innovation. Ainsi au début des années deux mille, nous avons créé un assemblage de deux cépages, le Riesling et le Pinot Gris. Autant vous dire que cela n’a pas été bien perçu dans le vignoble, beaucoup considérant que le vin d’Alsace est par essence mono-cépage. Pourtant avant les années quarante, la plupart des vins étaient issus d’un assemblage de nombreux cépages, les vignobles étant eux-mêmes, pour la plupart, plantés avec différents cépages sur une même parcelle.

La proportion des deux cépages du Black Tie varie d’une année sur l’autre entre 45 et 55%, en fonction de la maturité de chaque cépage de façon à reproduire sur chaque millésime le même style de produit.

Pour la petite histoire, Black Tie a été servi au dîner de gala de la remise du prix Nobel de la Paix 2006 à Oslo en présence de Sharon Stone.


 
RH. – Robe or pâle, brillante, avec des reflets verts. Bouquet charmeur avec des notes de miel, d’abricot, d’agrumes frais, de citron confit, d’écorces d’orange, de kiwi, d’ananas et d’épices douces où se dégagent la cannelle, le cumin et la cardamone.

Attaque ample avec beaucoup de fraîcheur; beaucoup d’élégance et de finesse, une belle matière aromatique sur les agrumes et l’ananas, une belle fraicheur également. Un vin harmonieux, à la fois charnu, et avec une petite pointe de minéralité. Une longue finale, fruitée et gourmande.

Quels mariages nous proposez-vous pour ce vin et à quelle température doit-on le servir pendant un repas?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Comme la plupart des vins d’Alsace, Black Tie doit être servi à une température comprise entre 10 et 12°C. C’est un vin qui s’associe très bien avec des fruits de mer en tartare ou en carpaccio, avec des cuisines de type « Asian Fusion » ou des cuisines modernes et inventives. Il se marie notamment à la perfection avec les sushis et sashimis.

RH. – Combien de temps peut-on le garder en cave?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Black Tie est un vin qui se comporte assez bien lors du vieillissement grâce à la vivacité du Riesling. Je préconise cependant de ne pas dépasser les cinq ans de vieillissement. C’est un vin qui est élaboré dans une optique de consommation sur sa fraîcheur, et non pour être conservé en cave de longues années.

Le Riesling/Pinot Gris Black Tie  est vendu à la Société de Alcools du Québec, code 11469621. Prix 19,95 $ au rayon Spécialités.

RH. – Nous débouchons maintenant le Gewurztraminer Cuvée Bacchus Pfaff 2014,
12,5 degrés d’alcool.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Le Gewurztraminer est un cépage dit aromatique qui se caractérise notamment par des parfums de rose et de litchi. Son nom vient du village de Traminer dans le Haut-Adige d’où il est originaire. Il a été implanté en Alsace où les terroirs ont exacerbé son côté épicé. Son nom est alors devenu Gewurztraminer, ce qui veut dire en dialecte alsacien « Traminer épicé ». Aujourd’hui, on trouve du Gewurztraminer dans le monde entier mais c’est sur le terroir alsacien qu’il s’exprime avec autant de complexité et d’élégance.


 
RH. – Robe jaune aux reflets dorés, brillante et limpide.Bouquet intense et complexe d’épices d’abord, où prédominent le  poivre blanc et la noix de muscade ; vient ensuite  un feu d’artifice de fruits exotiques : litchis, fruits de la passion, ananas, mangues, un peu d’agrumes et un délicieux parfum de rose.

Puissant en bouche, exubérant même, et plein de fraîcheur. Une matière dense, fruitée et épicée, intense mais en même temps harmonieuse. Une longue finale avec une grande persistance aromatique.
 
Avec quels mets pourrions-nous le déguster et à quelle température il faut  le servir?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Historiquement, il était habituel de conseiller le Gewurztraminer  sur du foie gras ou sur certains desserts, ce qui réduit tout de même les opportunités de consommation. Fort heureusement, la mondialisation, qui a parfois aussi du bon, a permis la diffusion de cuisine asiatique, indienne, sud-américaine. Hors, le Gewurztraminer est un des rares vins à pouvoir soutenir les cuisines épicées et les cuisines sucrées-salées. C’est également un vin qui sublime certains fromages forts comme les bleus, ou un vieux Cheddar ou encore un Munster, le célèbre fromage alsacien.

Pour ouvrir de nouveaux moments de consommation et surfer sur la vague des cocktails, nous venons de créer également, avec la participation de Fanny Gauthier d’Ateliers et Saveurs, deux cocktails à base de Gewurztraminer Pfaff Tonic et Pfaff me Up qui ont été présentés en avant-première lors de l’édition 2016 du Festival Mode et Design.

Pour la température de service, nous conseillons aux alentours de 10°C.

RH. – Quel est son temps de garde en cave?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD
. – Le Gewurztraminer est un cépage qui supporte très bien le vieillissement. La Cuvée Bacchus Pfaffpourra se garder sans problème une dizaine d’années. Il faut savoir qu’avec le vieillissement, le côté sucré du vin disparaît peu à peu. Un vieux Gewurztraminer sera donc plutôt sec.

Le Gewurztraminer Cuvée Bacchus Pfaff  (millésime 2013), est vendu à la Société de Alcools du Québec, code 00197228. Prix 19,95 $.

RH
. – Nous débouchons pour terminer le Pinot Gris Grand Cru Steinert Pfaff 2011,
13,5 degrés d’alcool.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Le Grand Cru Steinert est situé sur la colline surplombant le village de Pfaffenheim. C’est un terroir principalement calcaire au sol très sec et filtrant, exposé plein Est. La superficie totale de ce Grand cru est de 38,90 hectares. La Cave des Vignerons de Pfaffenheim contrôle plus de 10 hectares de ce Grand Cru dont presque 5 hectares plantés en Pinot Gris. On y trouve des parcelles de Gewurztraminer, de Pinot Gris et de Riesling.

2011 a été un millésime très précoce avec des vendanges qui ont démarré pour les Grands Crus, début septembre. L’état sanitaire des raisins était exceptionnel, et l’on a pu organiser les vendanges sans se soucier des risques de pourriture ou de la pluie. Les potentiels aromatiques et les concentrations en sucre étaient très importants, ce qui a donné un millésime assez difficile à vinifier, pour obtenir un bon équilibre acidité-sucre-alcool.


 
RH. – Robe jaune or intense, d’une belle brillance.Bouquet tout en nuances et d’une grande complexité. On perçoit tout d’abord des fleurs des champs, du musc, de l’abricot; un peu de miel et de la cire d’abeille, du pain d’épices, des fruits secs, avec des notes fumées.
Ample en bouche, d’une grande finesse, mais avec beaucoup de puissance ; charnu et gras avec une légère pointe d’acidité. Une finale longue et bien équilibrée ou la fraîcheur vient tempérer sa rondeur.
Avec quels mets pourrions-nous le déguster et à quelle température faut-il le servir?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – C’est un vin qui peut remplacer un vin rouge. Il s’associe parfaitement avec des plats en sauce tels que les viandes blanches et les volailles, les gibiers, ainsi que des poissons. Il est également parfait avec des champignons. C’est un vin gastronomique, il lui faut donc des plats assez relevés en goût.

RH. – Quel est son temps de garde en cave?

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Sur ce millésime, s’il est bien conservé, c’est un vin qui peut vieillir sans problème 15 à 20 ans.

Le Pinot Gris Grand Cru Steinert est vendu à la Société des Alcools du Québec, code 00729616. Prix 28,00 $, au rayon Spécialités.

RH. –  Merci de m’avoir accordé cette entrevue Frédéric Raynaud.

FRÉDÉRIC  RAYNAUD. – Cher Roger, c’est moi qui vous remercie et j’espère avoir répondu aux nombreuses questions que vos lecteurs peuvent se poser à propos des vins d’Alsace et notamment des vins Pfaff de la Cave des Vignerons de Pfaffenheim.

Liens :
Cave des Vignerons Pfaffenheim
Frédéric Raynaud
Directeur Général

cave@pfaffenheim.com

Représentés au Québec par
Vins Philippe Dandurand
www.vinsdandurand.com

SAMY RABBAT
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