Je parlais la semaine dernière avec Angela Molosnikov, qui est gérante du restaurant Toro Rosso, au cœur du Village. C’est un rare établissement qui s’en tire bien, car ils ont réussi l’heureuse combinaison d’une carte attrayante et des prix très accessibles. « Nous ça va encore, dit-elle, mais je pense à d’autres restaurants voisins (et de me donner des noms) qui sont au bord de la faillite ». Elle met le doigt d’abord sur les taxes trop élevées et les loyers ahurissants.

Un loyer qui coûtait 450$ à la fin des années soixante-dix est rendu dans les 15 000$! Les propriétaires exagèrent. Ils s’en foutent. Ce sont des spéculateurs qui empochent des avances de loyers qui leur constituent un joli pactole. C’est comme si vous étiez locataire à votre domicile et que pour occuper votre logis, il vous faudrait débourser en partant de 15 à 30 000$. En commerce, si vous vous cassez la gueule parce que trop rêveur, vous perdez votre mise.

Le proprio empoche et refait le coup avec un autre aventurier. Pour rencontrer ensuite de tels loyers, il faut en vendre de la bébelle et des plats. En ce moment c’est la sinistrose dans le Village. Et comme ajoute Angela: « Ce n’est pas que nous soyons le seul quartier à connaître cette situation. Mais il y avait des éléments qui nous laissaient croire à une revitalisation du quartier. Et tout d’un coup tout s’effondre ».

L’AUTRE CANCER DU VILLAGE, LES ITINÉRANTS

Au moment où mon interlocutrice me fait partager les misères des commerçants, il y a ce cri d’alarme de Louis-Alain Robitaille, fondateur du Collectif carré rose, qui dit de son côté que depuis deux ans, l’insécurité grandissante gagne les résidents. Au point que plusieurs ont foutu le camp ou songent à le faire. Et il a eu ce qualificatif parlant de la trop grande représentation d’itinérants, dont beaucoup de psychiatrisés, qualifiant le Village d’asile à ciel ouvert.

Exactement ce que je vous décrivais dans LaMetropole.com il y a des mois de cela. Sur la page Facebook de leur organisation, on rapporte une agression chaque mois. La pointe de l’iceberg sans doute, car on imagine que beaucoup de victimes n’osent pas porter plainte. Dans ce monde de tolérance et non d’acceptation de la vie homosexuelle, dites-vous bien qu’on est encore à des lunes de la réelle fierté gaie. Je suis à peu près le seul au Québec à porter le drapeau LGBT en épinglette au revers de mon veston. Et c’est si rare, qu'il ne se passe pas une semaine sans qu’on m’en fasse la remarque.

QUE FONT NOS CHÈRES AUTORITÉS?

Puisqu’il est question d’agressions, il fallait bien quelqu’un qui vienne nous contredire. Nous dire qu’on fait fausse route, que tout va très bien. Et je vous le donne en mille, c’est le commandant du poste de police 22, Danik Guerrero. Le type qui aura toujours une statistique à sa disposition pour tenter de nous endormir. Il avance que les crimes contre la personne ont chuté de 9%. Ça me fait penser à une compagnie qui se dit en déficit, bien qu’elle affiche 30 millions de profits nets. Mais par contre, par rapport au 50 millions anticipés, on est en perte de 20 millions.

Alors son 9%, il peut aller se le mettre quelque part. Et pour essayer d’interpréter le sentiment d’insécurité des gens du coin, il avance l’hypothèse que c’est en raison d’événements ponctuels. 

Il y a un peu plus de deux semaines, j’étais à prendre une bière un soir au Sky, avec une amie. Je ne vais jamais dans le Village le soir, c’est tellement tristounet. Nous étions un jeudi, pourtant.  PAS UN CHAT SUR LA RUE SAINTE-CATHERINE. Aussi endiablée que la Plaza Saint-Hubert un mardi soir de grand vent. La sinistrose la plus totale. Je comprends que Peter Sergakis, le patron, donne quasiment ses alcools, sinon il n’y aurait pas un client à la ronde. Politique de bas prix qui fait d’ailleurs rager les autres commerçants. Mais ça, c’est une autre affaire.



LA SDC DU VILLAGE FORTE SURTOUT EN DÉCORATION

Les commerçants en veulent à la Société de développement locale de ne pas se mouiller sur les problématiques qu’ils rencontrent et de trop se concentrer sur les décorations. Attendez, si la tendance se maintient, la SDC du Village, férue de décoration, devra prévoir un budget pour des couronnes mortuaires à placer devant les commerces tombés au front. Mais on comprend que l’exécutif ne veut pas trop brasser la cage de la ville. Leurs gros salaires sont payés par la mairie.

On ne va quand même pas cracher dans la main qui nous nourrit. Et le maire Coderre temporise sur la place publique, répétant, depuis qu’il est en poste, qu’il faudra encore de douze à dix-huit mois pour voir les effets des nouvelles politiques mises en place touchant à l’itinérance. Mais les commerçants n’ont plus la patience d’attendre. S’il me lit aujourd’hui, je veux vous faire savoir que vous ne pourriez pas faire plus plaisir aux commerçants en allant les rencontrer, mettons au Kilo café, on lui en offrira deux gratos pour qu’il entende de vive voix les doléances des sinistrés du commerce et non pas dans le cadre très réglementé des séances du Conseil d’arrondissement, où les gens n’ont pas le temps de s’exprimer.

Le Village devrait être un quartier gai. Hélas, c’est triste. Et en plus, les gais se vantent maintenant d’aller ailleurs.

LES OPINIONS EXPRIMÉES SONT CELLES DE L’AUTEUR ET NE REFLÈTENT PAS NÉCESSAIREMENT CELLES DU PORTAIL DU GRAND MONTRÉAL LAMETROPOLE.COM

MÊME LES DANSEUSES NUES ÉCOPENT...