Mercredi, 14 janvier 2015

SEIGNEUR! UN MOINE SUR FACEBOOK

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Le démon est malin. Il a réussi à s’infiltrer au monastère de Saint-Benoît-du-Lac. De sorte qu’un moine est maintenant sur Facebook. En vérité je vous le dis, adieu réclusion, l’Apocalypse est à nos portes.

 
Je ne suis pas une grenouille de bénitier, encore moins un mangeur de balustres, comme on désignait jadis les ultracatholiques. Moi qui, jusqu’à l’âge de vingt-sept ans, me voyait engagé dans la carrière ecclésiastique avec une mitre sur la tête, la crosse en main et de l’autre distribuant ma bague épiscopale à baiser. J’ai tout foutu ça en l’air, fort heureusement, sur les pressions du philosophe de Montréal, et aussi une difficulté à concevoir le vœu de chasteté. Ceci pour cause de priapisme (ici faites une pause et allez au dictionnaire).

Par contre j’ai toujours gardé une belle candeur face à la vie monastique et assez souvent je me rends à l’Abbaye de Saint-Benoît-du-Lac. Séjour que je recommande hautement à tous, pour tout ce que le domaine a de paisible, au pied du lac Memphrémagog. Et surtout pour la thérapie que représente l’écoute du chant grégorien. Mais là, quelle n’est pas ma surprise d’apprendre qu’un de leurs moines, Dom Dominique Minier, a sa page Facebook. Je me suis dit immédiatement, la fin du monde est proche. Car la vie monastique prend tout son sens si elle est une réclusion face au monde.



Je savais bien que les moines, du moins le Père Abbé, avaient accès à des sources d’informations comme les journaux. Mais de savoir qu’Internet est accessible aux moines me dérange un peu. À vrai dire, je ne sais pas quoi penser. Sans compter les tentations charnelles auxquelles s’exposent les moines sur l’écran quand surgissent des créatures de rêves avec des sites XXX, comme Vivid, payable par PayPal et promu par Anne-Marie Losique. Jamais le mot argent de poche n’aura trouvé ici tout son sens.

Dans un commentaire enregistré en 2013 et diffusé en trois parties sur YouTube, l’actuel Père Abbé Dom André Laberge, s’il admettait la présence des ordinateurs, émettait toutefois une restriction au fait que des moines puissent se retrouver sur des réseaux sociaux. Une année et des grenailles plus tard, c’est un de ses moines qui a non seulement son site Internet en propre comme une vedette du showbizz, mais sa page Facebook. Je cours tout de suite faire trois Je vous salue Marie. Il se produit même en spectacle avec sa voix en mode grégorien, mais soutenu par des musiciens contemporain. Saint-Benoît de là-haut doit se faire du mauvais sang. 

Dom Laberge, son patron, est un homme de grande ouverture. Et je crois que sa tolérance est tout à son honneur. Mais en même temps, c’est faire entrer le loup dans la bergerie. Je me risque à dire qu’on ne retrouverait pas l’équivalent chez les moniales,  qui sont plus encore dans l’Absolu. Elles en sont même au XXIe siècle à s’adresser aux visiteurs à travers des grillages. C’est vrai que les femmes en font toujours une tonne, avec des « Jésus mon époux ». C’est tout de même saisissant, ce renoncement total au monde. Tandis que les hommes aiment tellement le plaisir…

On prétextera que les actions de Dom Minier visent à répandre le beau. L’intention est noble. Mais je dis ceci, quand un produit est super, il n’a pas besoin de faire de publicité. Le public va rapidement trouver le chemin pour chercher sa pitance. Regardez les Dollarama et la chaîne d’alimentation Adonis, on n’y fait pas de réclame et ces endroits sont amplement connus de la population. Le monastère de Saint-Benoît-du-Lac est renommé depuis des lustres. Il ne faut pas forcer la note et vouloir à tout prix faire des adhésions par le biais des réseaux sociaux. Je vous le dis, le diable est dans la place. L’apothéose sera quand des moines chanteront aux offices tout en consultant leur iPhone… Mundus sum realiter infirmos (en latin, le monde est vraiment malade).



LES OPINIONS EXPRIMÉES SONT CELLES DE L’AUTEUR ET NE REFLÈTENT PAS NÉCESSAIREMENT CELLES DU PORTAIL DU GRAND MONTRÉAL
LAMETROPOLE.COM

L’INTOXICATION DES PUBS SUR LE WEB
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