GINETTE RENO EN DANGER

C’est un hasard qui nous a fait découvrir que la vente des billets pour sa série de spectacles qui démarre le 12 avril au théâtre Saint-Denis ne décolle pas. Ils ont pourtant été mis sur le marché depuis un petit bout de temps. Même que pour la première, il y a encore plein de sièges disponibles. C’est inquiétant. Quand on pense par exemple que pour une Lise Dion, non seulement les billets pour ses représentations s’enlèvent en un temps record, mais elle enchaîne les supplémentaires.

De deux choses : ou bien Ginette Reno a fait preuve d’une mauvaise stratégie, ou encore que le public priorise l’humour.

UNE RÈGLE

Je dois au philosophe de Montréal de m’avoir alerté sur la piètre performance au guichet de la vente des billets de Ginette Reno. Divers aspects sont à considérer. Il faut se rappeler qu’avant ses spectacles de l’an dernier à la salle Pierre-Mercure, en marge de la sortie de son album « Fais-moi la tendresse » il y avait des années que notre grande chanteuse ne s’était pas produite sur scène. L’intérêt était donc manifeste pour ses admirateurs de pouvoir l’entendre en direct, où elle est toujours à son meilleur et généreuse vocalement. Et puis le disque avait dépassé le cap des 280 000 copies. Donc le décor était planté pour un succès annoncé.

Mais voilà que surfant sur ce retour en gloire après son passage au purgatoire, elle lance un autre album qui lui, n’a pas franchi les 100 000 copies (remarquez que même à 80 000, ce serait déjà pas mal), puis tout de suite une autre série de récitals. Il lui aurait fallu se faire désirer un peu.

CRISE ÉCONOMIQUE

L’autre hypothèse, c’est que les gens n’ont plus d’argent. Tout le monde est serré à la gorge. On n’en parle pas trop car c’est gênant. Mais quand les statistiques vous disent que pour chaque dollar gagné les Canadiens en doivent 1,53$, c’est que ça va mal un peu beaucoup. Ça me rappelle l’époque où je produisais des concerts classiques. Je mettais tous les efforts consentis et des programmations musicales alléchantes, dont notamment des sons et lumières dans des églises. Et j’avais de maigres recettes. Quelqu’un a écrit, dont j’oublie le nom, un grand théoricien d’ici sur le marketing artistique, qui disait que si malgré l’énergie mise le taux de réponse n’est pas à la hauteur, ce n’est pas parce que les gens n’aiment pas votre produit, c’est qu’ils en préfèrent un autre.

En somme, si votre budget de divertissement est de 300$ par année, vous sélectionnerez par ordre d’intérêt. Or, Ginette Reno n’a plus cette préférence. Elle est en danger. Elle se plaignait elle-même que son dernier disque ne tournait pas à la radio. Dur, dur, après cinquante ans de carrière, de se retrouver à l’arrière du peloton des Marie-Mai et Cœur de pirate. Son public vieillit avec elle comme Michel Louvain avec le sien. Et, bien que la voix soit impressionnante plus que jamais, les thèmes sont hélas souvent les mêmes, des variations sur l’amour frustré. Et c’est sans compter ses blagues salaces sur ses gros manques entourant la chose… même auprès des chastes oreilles des académiciens.

Ça devient redondant. Normalement elle n’aurait jamais dû accepter de devenir juge à Star Académie. Les dimanches de Gala, elle a visiblement l’air de s’ennuyer. Même qu’elle essaie de distraire en se coiffant d’une tuque à la Schtroumpf. C’est pathétique. Mon petit doigt me dit qu’elle a accepté à la demande de René Angélil, à qui elle doit son retour en grâce lorsque le célébrissime gérant lui a permis de chanter en compagnie de sa Céline aux Plaines d’Abraham. Un juste retour d’ascenseur. Heureusement que dans ses enseignements, elle n’a jamais dit à son jeune auditoire que ce métier était facile. Cher public, ne vous montrez pas ingrats et allez applaudir celle qui donne sa véritable classe de maître dans une salle.

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