LA VRAIE GRANDE NOIRCEUR

Je dois tout le crédit de la réflexion qui va suivre à mon pote, le philosophe de Montréal, qui, lorsqu’il est en mode déprime, est au meilleur de ses réflexions. Et celle-ci est de taille. Voyez, on a dit des années de nos grands-parents que c’était l’âge de l’obscurantisme, du contrôle de l’Église, de l’asservissement de la femme et quoi encore. Mon copain est d’avis, et je ne le contredis nullement, que c’est maintenant que nous vivons la grande noirceur. Et n’allez pas croire que nous sommes passéistes et cathos sur les bords.

Loin de là. Mais force est de reconnaître que nous connaissons un déclin sur tous les tableaux, comme ce n’était pas le cas jadis. D’abord on parle des problèmes en santé. Du temps où les religieuses dirigeaient nos hôpitaux, on calculait le nombre de « plasters » utilisés et jamais vous ne voyiez des gens en attente dans les hôpitaux. C’était autrement mieux organisé. Il y avait bien moins d’erreurs médicales que maintenant. Les gens avaient leur médecin de famille, qui mieux encore, se déplaçait à domicile. Essayez d’en trouver un aujourd’hui les soirs et les week-ends. Côté boulot, tu naissais et mourrais dans l’entreprise. Présentement, tu en es à te demander si tu seras capable de finir l’année, tellement les pressions sont énormes. Les cas de détresse au travail sont effarants.

MAMANS PRÉSENTES

À l’époque les mères s’occupaient de leurs enfants, du moins de la naissance jusqu’à la sixième année du primaire. Elles étaient présentes à la maison et les enfants déjeunaient le matin. Maintenant les mères veulent s’émanciper, et les enfants ne déjeunent plus. Si une mère célibataire de jadis plaçait son enfant à la crèche, au moins on était certain que les religieuses veillaient à leurs soins. De nos jours on se retrouve avec des centres d’accueil avec tout le cortège d’horreurs, et des ados qui veulent en finir avec la vie. Rarement dans les années cinquante entendait-t-on parler de mettre fin à ses jours chez les jeunes. C’est devenu maintenant un lieu commun.

RESPECT DE L'AUTORITÉ

À l’école d’autrefois, les directeurs faisaient encore peur et la « strap » existait pour les récalcitrants et les écoles de réforme. Pas besoin ici d’allonger sur ce qui se passe dans nos institutions scolaires, où c’est la Charte des droits et libertés qui règne. On accuse nos ancêtres d’avoir été des ignorants. Très bien. Regardez présentement, avec Internet et les autres moyens de communication. Jamais le savoir n’a été autant à la portée de tous. Et pourtant l’ignorance de nos jeunes dépasse l’imagination. Dans nos collèges de naguère, les religieux qui, n’exagérons rien, n’étaient pas tous des pédophiles, ont formé la jeunesse aux humanités, consacrant le temps qu’il fallait pour l’apprentissage des matières.

Beaucoup de vieux gardent un souvenir ému de cette période qui valorisait le progrès des connaissances. Et en 2011, on produit des débiles légers à la tonne. Puis, en ce deuxième millénaire, grand progrès du côté des droits de la femme, elles se traitent entre elles de bitch, de pute, de salope sur les réseaux sociaux. Au grand jamais on ne se serait permis des remarques semblables à l’endroit d’une femme du Québec au cours années passées. Il y avait un minimum de respect. Alors cessons de colporter que les années cinquante, pour ne nommer que celles-là, étaient des années noires. Aujourd’hui c’est plus noir que jamais.

Et quand Duplessis est mort, il a laissé des surplus dans les caisses de l’État. Voyez le déficit qui atteint, à l’heure actuelle, des milliards stratosphériques. Amusez-vous maintenant à comparer comme nous et demandez-nous où se trouve réellement la fameuse époque de la grande noirceur. Pour le philosophe de Montréal et moi, il ne fait pas l’ombre d’un doute que c’est maintenant. Et si vous doutez de la véracité de nos propos, vous n’avez qu’à regarder « J’ai la mémoire qui tourne », à l’antenne du canal Historia, animé par Marcel Sabourin. Ce sont tous nos films d’archives en 8mm qui passent en boucle. Et savez-vous quoi? On voit énormément de sourires et de gens en gang qui s’amusent. Aujourd’hui vous affichez des mines d’enterrement et vous vous retrouvez seuls devant votre ordinateur. Choisissez votre époque.

Les opinions exprimées sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles de LaMetropole.com