SILENCE ET AMOUR IMPOSSIBLE

J’ai souvent pensé que l’amour véritable était indissociable des difficultés et des épreuves. Lorsque l’on réfléchit à ces belles histoires d’amour, Tristan et Iseut ou Roméo et Juliette, elles ont toutes quelque chose en commun, elles sont impossibles. Si l’amour donne des ailes, l’amour impossible, quant à lui, donne le vertige. Tomber en amour, c’est accepter les hauts et les bas, entre ciel et terre. Tomber en amour lorsqu’il est impossible, c’est accepter le vertige, la passion, et ce, sans délivrance.

Les symbolistes, des poètes du 19e siècle, entretenaient presque tous un amour impossible. Des femmes qu’ils aimaient mais ne côtoieraient jamais, du moins, dans l’intimité. Ces femmes incarnaient la passion, mais aussi elles étaient des muses. L’amour impossible est une muse pour l’artiste, une œuvre inachevée. Je te touche dans mes rêves, mais ici dans mes bras, tu n’existes pas. Bien entendu, l’humain désire ce qu’il ne peut pas avoir, mais est-ce tout? Est-ce la seule force que l’amour impossible détienne? Non. Cet amour-là, c’est comme acheter du rêve en capsule. Toucher l’intouchable, caresser l’inatteignable ou parfois même, le défendu.

Mes proches s’inquiètent; plusieurs souhaiteraient que je mette un point final à une relation utopique, éprouvante et passionnante. D’autres prétendent, comme Freud, qu’il s’agit seulement d’une pulsion d’autodestruction, une manière de me détruire sans me blesser physiquement. Ces gens, même s’ils désirent mon bien-être, ne connaissent rien à l’amour impossible. Il est ce qu’il incarne, le fantasme absolu ou le rêve que l’on pense plus vrai que les autres.

Mon amour impossible n’est ni secret, ni tabou. D’abord, deux gamins s’aimaient. Ensuite, ils ont grandi. Puis, ils se sont éloignés et retrouvés. Enfin, ils sont morts en devenant adultes. Les adolescents estiment que la liberté se trouve à l’âge adulte. Adulte, je reconnais la liberté des enfants. J’avais douze ans et elle onze, nous passions des journées entières assis sur un quai à nous demander ce qu’était l’amour... c’était ça! L’envie de partager nos moindres désirs, pensées, doutes, et ce, sans inhibition. Avec l’âge adulte vient une gêne, des voiles que nous déposons devant nos yeux et nos sentiments.

Cette femme, mon «amour impossible», se trouve constamment près de moi. Elle hante mes rêves, monopolise mes pensées et mon énergie, déboussole mes sens et tue ma détresse. Parce qu’il a le pouvoir de me réveiller alors que je dormais, ce fantasme est plus vrai que la réalité même. Oui, j’imagine! Oui, je me plonge dans une chimère! Mais n’est-ce pas mon métier? Ne suis-je pas écrivain? Je vends du rêve, j’écris pour ceux qui souhaitent s’évader. Moi-même, je me perds dans mes récits et lorsque je croise ses yeux, je disparais l’instant d’une minute. Je ne suis plus Samuel Bricault, je suis Tendresse, Désir, Passion, Amour et Bonheur.

J’aimerais écrire une conclusion,mais la vérité, c’est que l’amour impossible n’en connaît pas. Il réside au fond de mon âme et de la sienne. Il dit « je t’aime » en silence. Il explose lorsque je tiens sa main. Il n’a pas de mots, de lieux et encore moins de conclusion. Puisqu’il existe, il ne meurt pas. La conclusion se trouve peut-être là, dans l’immortalité des écrits et des sentiments. Mais encore une fois, je m’égare. La conclusion réside dans l’absence de mots, dans l’inspiration que je dois prendre en écrivant ces lignes afin de ne pas mourir de chagrin. Et même si cela ne changera rien, ici je te l’écris : « Je t’aime ».

Source : LaMetropole.com